Après avoir recensé les tableaux français des XVIIe et XVIIIe siècles conservés en Allemagne, Pierre Rosenberg, aidé par Benjamin Peronnet et David Mandrella, s’est attaché à inventorier le fonds des dessins français de la même époque appartenant aux musées de Weimar [1]. Cela donne aujourd’hui une remarquable exposition au Musée Jacquemart-André. Les petites salles du Musée Jacquemart-André se prêtent bien aux présentations de dessin. L’atmosphère feutrée y est propice à la contemplation.
Une partie des œuvres exposées (environ vingt pour cent) appartenaient à Goethe lui-même et sont aujourd’hui conservées au Goethe-Nationalmuseum. L’écrivain conseilla également, à partir de 1776, le duc Charles-Auguste dans la formation de sa propre collection aujourd’hui au Schloßmuseum. Il achetait ce qu’il trouvait sur le marché allemand qui, semble-t-il, abondait en dessins français. Son goût le portait davantage vers le XVIIe et on compte parmi celles-ci deux beaux Claude Lorrain, une superbe feuille de Jean Jouvenet. Il ne négligeait cependant pas le XVIIIe siècle puisque le seul (et magnifique) dessin de Watteau des musées de Weimar lui a appartenu.
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- 1. Ecole française, vers 1699
La statue de Louis XIV à cheval de Girardon
Plume et encres brune et noire, pierre noire, lavis -
31 x 26,6 cm
Weimar, Goethe-Nationalmuseum
© D. R. - Voir l´image dans sa page
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- 2. Charles Natoire (1700-1777)
L’apothéose de Saint Louis
Plume et encre noire,
aquarelle - 59,7 x 30,9 cm
Weimar, Schloßmuseum
© D. R. - Voir l´image dans sa page
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- 3. François Boucher (1703-1770)
Un triton tenant entre ses mains un bénitier
Pierre noire, rehauts de craie - 32,8 x 29,7 cm
Weimar, Schloßmuseum
© D. R. - Voir l´image dans sa page
Mais la référence à Goethe est en réalité de peu d’importance et le principal intérêt de l’exposition n’est pas là. La moitié des 107 notices du catalogue porte sur des œuvres totalement inédites ou nouvellement réattribuées. On pourra découvrir dans l’exposition des dessins inconnus de Pierre Brébiette, Eustache Le Sueur, Claude Lorrain (un troisième, qui ne vient pas de Goethe), deux Gaspard Dughet, deux Charles Le Brun, un Boucher, un Hubert Robert [2]... Quelques feuilles restent anonymes, dont notamment deux splendides interprétations du monument équestre de Louis XIV par Girardon (ill. 1) provenant de Goethe. Parmi les plus belles œuvres, on en notera deux déjà publiés : une aquarelle de Natoire, préparatoire au plafond de l’église Saint-Louis-des-Français (ill. 2) et une pierre noire de Boucher (ill. 3), préparatoire au Coucher du soleil de la Wallace Collection.
Le catalogue, de conception classique, contient des notices très complètes pour chaque dessin exposé. Un inventaire illustré exhaustif répertorie en annexe tous les dessins français de Weimar et ceux rendus à d’autres écoles. On constate ainsi que l’exposition aurait pu encore être beaucoup plus riche, de nombreuses feuilles inédites auraient également mérité d’être montrées (Allegrain, Dandré-Bardon, Loutherbourg, Rémy Vuibert...).
David Mandrella, Hermann Mildenberger, Benjamin Peronnet, Pierre Rosenberg, De Callot à Greuze. Dessins français des XVIIe et XVIIIe siècles des musées de Weimar, G + H Verlag, Berlin, 2005, 350 p., 49 €. ISBN : 3-931768-82-1 (édition française).